Le refus, 482 / 925 mots

Lors du dîner des Dieux, la déesse Éris lança la pomme de la discorde aux autres déesses présentes qui se déchirèrent pour la posséder. Zeus leur roi nomma un humain, Paris le Troyen, pour les départager. Celui-ci accorda la pomme à Aphrodite qui lui promit en retour, l’amour de la plus belle des femmes. Paris revendiqua son prix et kidnappa celle de Ménélas, Hélène, qui était la plus belle à ses yeux.

Ulysse était Roi d’Ithaque et responsable de tous les gens qui vivaient sur les îles de son royaume. Il aimait anticiper les événements et avait pris connaissance du plan de Ménélas et de son frère Agamemnon de réunir une armée grecque pour marcher sur Troie, obtenir réparation, et reconquérir sa femme. Il revenait du lac Averne où il avait consulté l’oracle à propos de cette aventure et il était bien décidé à ne pas se laisser entraîner dans leur folie. Il savait que bientôt, les deux frères viendraient frapper à sa porte pour demander son renfort et il avait trouvé une échappatoire. Sa propre folie et la pitié qu’il leur inspirerait le rendraient inapte à leur prêter main-forte dans leur expédition.
Sans avoir prévenu quiconque de son stratagème, il emprunta des vêtements à son vacher et quitta sa maison. Il attela sa charrue avec un âne et un bœuf et entreprit de labourer ses champs. Il répondait à ceux qui l’interrogeaient que ses deux meilleurs chevaux composaient un attelage formidable.
Les labours terminés, Ulysse entreprit de semer du sel dans ses champs et il racontait à qui voulait l’entendre, que cette année, le blé serait exceptionnel.
La rumeur sur l’état désastreux du Roi d’Ithaque se répandit vite dans le royaume, mais Ulysse acceptait de payer ce prix. Pourtant, il ne savait pas que Palamède, dont la ruse et la sagesse rivalisaient avec sa propre valeur, et dont la jalousie motivait sa volonté, marchait vers lui avec les deux frères.

Palamède, qui ne sous-estimait pas son adversaire, refusait que leur querelle s’arrêtât avant qu’il eût pu le surpasser. Il vit l’occasion rêvée de confondre Ulysse et de prouver la supériorité de son intelligence. Il se présenta devant l’attelage d’Ulysse, prit Télémaque des bras de Pénélope et sortit son glaive de son fourreau, pour menacer l’enfant. Ulysse, envahi par la peur de perdre son fils, stoppa la charrue, se redressa aussi dignement qu’un Roi vêtu de haillons et les pieds boueux, pouvait le faire.

— Tu m’as démasqué Palamède. Relâche mon fils immédiatement. J’avoue avoir monté ce subterfuge pour tromper Ménélas. Je voulais couper court à toute revendication qu’il était venu me faire entendre et détourner sa route d’Ithaque.
Le feu brûlait dans les yeux de Palamède qui savourait sa victoire. Il relâcha son emprise et rangea son glaive.
— Tu es malin Ulysse, mais ta fourberie ne t’empêchera pas d’affronter ton devoir envers la Grèce. Ménélas arrive et il vient quérir ton soutien.

Le refus

Parfois, il arrive qu’un héros soit juste un personnage qui a fait un mauvais choix. Ou en tout cas un choix déraisonnable et contre ses intérêts propres. Il y est poussé par sa vanité (t’es pas cap’), par sa faiblesse (impossible de dire non) ou par amour propre (que diront-ils si je refuse). Je ne parle pas de tous ces preux chevaliers aux armures étincelantes qui traversent d’innombrables dangers au péril de leur vie pour secourir les chatons, bien que ces personnages ont fortement tendance à disparaître.
Non, là je parle du gars qui se lance dans un truc impossible et complètement altruiste. C’est le fameux « moi je vais le faire », lancé par un frêle hobbit au conseil des sages venus des quatres coins du pays pour savoir qui ira jeter un anneau au cœur du territoire ennemi.
https://www.youtube.com/watch?v=ugkkv9Y0BO0
Imaginez si ce hobbit s’était mordu la langue au lieu de sauter de sa chaise. Ça aurait donné « Bon ben merci j’ai fait ma part, allé salut, à la prochaine » et on aurait eu un seul tome des aventures de Frodon Sacquet. À la place, Boromir aurait peut-être reçu l’anneau pour en faire autre chose, ou bien Gandalf s’en serait chargé et aurait été corrompu par le pouvoir.
Alors non, ne vous inquiétez pas, je ne ferai l’affront à pesonne de tenter vainement de réécrire une autre version du seigneur des anneaux. Mais l’idée est bien là, il faut juste un autre héros avec un parcours similaire… Il y en a sans doute beaucoup qui correspondent au profil (pitié, épargnez-moi marvel et DC), mais celui qui m’a paru le plus évident est Ulysse. Le héros parmi les héros. Il ne part pas à la guerre, on vient le chercher pour y participer et pour un prétexte assez discutable. Voici l’odyssée qu’Ulysse refusa.
J’ai gardé les mêmes personnages et le même contexte. La ruse employée par Ulysse est dans la version originale. La mienne diffère uniquement dans le fait qu’Ulysse s’accroche à refuser de se laisser embarquer dans une affaire de vengeance.